3 épreuves allaient conclure ces championnats ; un nouveau round de variantes de 88 minutes, promettant de proposer de la matière avec notamment la grille la plus chère du tournoi, un sprint de 15 minutes consistant en une imbrication de grilles classiques, et un ultime round de variantes de 35 minutes, tout entier dédié au fameux chiffre 8. En ce second matin de compétition mon extinction de voix avait quasiment réduit à néant ma capacité à m'exprimer ; il est heureux que la journée n'ait pas comporté d'épreuves par équipes (le problème se posa toutefois dès le lendemain...).
J'entamai cette seconde journée dans un curieux état mixte mêlant fatigue, abattement et détermination en vue de conserver ma position de n°2 provisoire.
Mardi 15 octobre - second jour de compétition WSC
Mardi 15 octobre - second jour de compétition WSC
Épreuve 9 : Close Relative Sudoku (88')
16 grilles constituaient 8 paires, composées chacune d'une variante commune et d'une variation de celle-ci. Le Diagonal Sudoku était ainsi décliné en Anti-Diagonal, le Consecutive en X-Consecutive (le 1 du sudoku consécutif traditionnel laissant place à une inconnue à déterminer), alors que le Outside Sudoku héritait quant à lui d'un descendant difficile à ignorer : le 6-Cell Outside Sudoku, donné à 66 points, promettait des sueurs froides à qui s'y attaquerait. Échaudé par le Mathdoku de l'épreuve 5 et convaincu que le 6-Cell ne serait pas rentable, j'avoue que je ne le regardai même pas. Je commençai par me débarrasser de toutes les grilles courantes (1/3/5/7/9/11/13/15) et de celles parmi les variations qui me convenaient le mieux : Antidiagonal (2), Odd-Even Consecutive (6, sans grande efficacité), X-Difference (8, plus rapidement), Within Box Skyscrapers (12) et Anti-Knight-and-Queen (14). À moins de 10 minutes de la fin de l'épreuve, me restaient le Halved Squares Sudoku (41 points), le 6-Cell et un Outside Consecutive Sudoku à 45 points sur lequel, manque de préparation aidant, je ne me sentais pas en confiance. J'optai pour le Halved Squares, lequel ne semblait pas redoutable, et pus effectivement le terminer largement dans les temps. Je me lançai ensuite sans le moindre espoir sur le Outside Consecutive et commis une erreur qui trancha définitivement en ma défaveur. J'espérais donc 489 points, un score qui bien que peu impressionnant semblait me placer dans les trois meilleures performances, d'après les échos saisis au sortir de l'épreuve. Hélas, avoir interverti les 6 derniers chiffres de la Within Box me coûta la coquette somme de 50 points. Bilan : 439/600, maximum de 493 pour Jan Mrozowski.
Épreuve 10 : The Great Wall (15')
Cinq grilles classiques reliées deux à deux par un coin formaient ladite muraille. 20 points étaient attribués par grille résolue, soit un maximum de 100 points hors bonus. Compléter la muraille dans les délais semblait un beau défi compte tenu du niveau des grilles classiques de l'épreuve 4, mais tel devait être l'objectif des postulants au top 10. La grille s'avéra soluble dans les temps... à condition de réaliser suffisamment vite que le seul moyen de la casser était de progresser de la droite vers la gauche. Je mis malheureusement plusieurs minutes avant de m'en apercevoir et ne pus en finir que d'extrême justesse, là où quelques joueurs ayant eu le bonheur d'attaquer plus tôt du bon côté réussirent à grappiller 1 à 5 minutes de bonus (meilleur score pour Tiit Vunk une fois de plus, avec 140 points). La réalisation de cette grille était probablement un peu discutable ; compte tenu de sa difficulté relativement élevée, il était tout à fait possible de s'entêter sur la partie gauche de la grille, effectuant de modestes mais insuffisants progrès sans jamais réaliser que l'on faisait face à une impasse. Ceci mis à part, la grille était techniquement bien conçue et sa difficulté justement dosée à mon avis.
Cinq grilles classiques reliées deux à deux par un coin formaient ladite muraille. 20 points étaient attribués par grille résolue, soit un maximum de 100 points hors bonus. Compléter la muraille dans les délais semblait un beau défi compte tenu du niveau des grilles classiques de l'épreuve 4, mais tel devait être l'objectif des postulants au top 10. La grille s'avéra soluble dans les temps... à condition de réaliser suffisamment vite que le seul moyen de la casser était de progresser de la droite vers la gauche. Je mis malheureusement plusieurs minutes avant de m'en apercevoir et ne pus en finir que d'extrême justesse, là où quelques joueurs ayant eu le bonheur d'attaquer plus tôt du bon côté réussirent à grappiller 1 à 5 minutes de bonus (meilleur score pour Tiit Vunk une fois de plus, avec 140 points). La réalisation de cette grille était probablement un peu discutable ; compte tenu de sa difficulté relativement élevée, il était tout à fait possible de s'entêter sur la partie gauche de la grille, effectuant de modestes mais insuffisants progrès sans jamais réaliser que l'on faisait face à une impasse. Ceci mis à part, la grille était techniquement bien conçue et sa difficulté justement dosée à mon avis.
Épreuve 11 : The Lucky Number 8 (35')
Huit grilles, et nous connaîtrions le nom des 10 finalistes de ces championnats 2013. Sept ne m'inquiétaient pas outre mesure, une me faisait hésiter quant à la stratégie à adopter. Le Distance to 8 Sudoku était donné à 50 points et pouvait fort bien gâcher l'épreuve à lui seul, que ce soit par sa difficulté ou à la suite d'une erreur identifiée trop tardivement.
Je commençai par les trois dernières grilles. Le With 8 Sudoku tomba en un clin d'oeil, et le 4 by 2 ne posa guère plus de problèmes ; puis les choses se gâtèrent. Je commis une première erreur sur le 8 by 4, qu'il me fallut plusieurs minutes pour identifier et que je ne pus corriger. Je l'abandonnai là, entamai le Distance to 8 dans l'espoir qu'il se révèle plus aisé que son score le laissait entendre... et, après quelques minutes de travail, fis face à une contradiction. Ayant trop peur de perdre l'essentiel de mon temps sur cette seule grille, je me mis à l'abordage du Little Killer, une variante dont je pensais maîtriser les subtilités, mais échouai inexplicablement à exploiter l'indice 48. Je laissai donc une troisième grille irrésolue et décidai de me remettre en selle sur le Classic 8, un simple sudoku classique 8x8 à 12 points qui ne devait pas pouvoir me poser de problème. Deux minutes plus tard, je le gommai pour la première fois et refis immédiatement une tentative. À nouveau deux minutes plus tard, même conclusion ; je laissai là le sudoku classique et attaquai le Answer 8 Sudoku, donné à 38 points mais qui ne me semblait pas pouvoir s'avérer réellement difficile. Hormis une petite inversion que je pus heureusement corriger, j'en vins à bout... mais nous approchions déjà du coup de gong final. J'eus le temps de revenir au 8 by 4, que je terminai néanmoins laborieusement, mais pas celui de faire une troisième tentative sur le Classic 8.
J'achevai ainsi cette série de 11 épreuves sur un fiasco, ayant recommencé plus de grilles que je n'en avais terminé, et ayant notamment réussi à échouer deux fois sur un sudoku classique dont un enfant viendrait à bout. 108 points visés sur 230 alors que j'espérais un minimum de 180 ; ultime coup du sort, 10 points me furent retirés pour une case fausse sur le Answer 8 - je vous laisserai juger de l'énormité de la chose :
Malgré cela je parvins à préserver mon avance sur mes adversaires directs et c'est toujours en 2e position qu'apparaissait mon nom lorsque fut publié le classement cumulé. Tiit demeurait premier avec une marge des plus conséquentes, lui garantissant de démarrer les playoffs avec plus de 5 minutes d'avance sur l'ensemble des autres finalistes. S'il semblait promis à une médaille, j'avais bien l'intention de rattraper ma finale manquée de la veille et de faire tout mon possible pour accrocher un podium.
Après que Chen Cen, assistée de Wei-Hwa Huang à la traduction, nous eût communiqué les instructions nécessaires, chacun prit place à la table qui lui était réservée dans l'attente du top départ. La demi-finale allait donc opposer les 10 meilleurs joueurs au classement cumulé des 8 épreuves individuelles, nommément Tiit Vunk (2176), moi-même alias Bastien Vial-Jaime (1865), Kota Morinishi (1857), Jin Ce (1833), Jan Mrozowski (1831), Jakub Ondroušek (1785), Hideaki Jo (1746), Seungjae Kwak (1728), Sun Cheran (1654) et Jan Novotny (1617). 9 grilles nous attendaient, divisées en 3 séries de 3, chacune comportant une classique et deux variantes. Reprenant le modèle des finales 2011, la totalité des demi-finalistes allait se confronter à la première série mais seuls les sept plus rapides accèderaient à la deuxième, la troisième n'étant ouverte qu'aux cinq premiers arrivés. Pour les traînards, les playoffs s'arrêteraient donc à la 3e ou à la 6e grille.
Playoffs - grille 1 (classic sudoku)
Une grille de difficulté moyenne pour se mettre en train ; Tiit, déjà fort de ses cinq minutes de bonus, en vint à bout rapidement (2'05) et il me fallut encore patienter plus de trois minutes avant de pouvoir l'entamer. Stressé, ma résolution fut plus laborieuse et j'en finis en à peu près 2'45 ; compte tenu du fait que quelques secondes séparaient mon départ de celui de Kota et Jin et que j'en finis avant eux, on peut toutefois supposer que leur temps ne fut pas inférieur au mien sur cette première grille. Je progressai donc d'un rang et rejoignis Tiit qui, après plus de 6 minutes de travail, n'avait pas encore réglé son compte à la deuxième grille.
Playoffs - grille 2 (killer sudoku)
Plutôt un de mes points forts, je savais cependant que plusieurs joueurs parmi mes adversaires étaient loin d'être maladroits sur cette variante, Jin Ce le premier. Je repérai rapidement un premier doublet 79 en région 3, lequel menait au placement de 3 chiffres. Puis je pénétrai une bulle d'inefficacité dont je ne parvins à m'extraire que 8 longues minutes plus tard, après avoir raté absolument tous les placements évidents que comportait la grille - laquelle était de difficulté tout à fait modeste. Tiit n'en avait fini que peu de temps avant moi après plus de 13 minutes de souffrance, et à l'exception de Jan Novotny tous les autres concurrents en avaient profité pour nous rattraper... et nous dépasser.
Playoffs - grille 3 (antidiagonal sudoku)
Je résolus sans histoire bien que sans gloire cette troisième grille de difficulté moyenne, dans un temps probablement équivalent à celui de Tiit, mais je savais en rendant ma feuille que les dés avaient été jetés lors de la grille précédente. Sept concurrents avaient déjà entamé la résolution de la deuxième série de grilles, et l'aventure s'arrêtait là pour nous. Nous échangeâmes un regard et la déception qu'il lut dans le mien devait probablement correspondre à celle qui fut la sienne lorsqu'il comprit que c'en était terminé de ses chances après avoir dominé d'une tête l'ensemble de la scène compétitive durant une journée et demie d'épreuves. Devant, la course continuait mais nous ne verrions jamais les six grilles suivantes.
Après que Chen Cen, assistée de Wei-Hwa Huang à la traduction, nous eût communiqué les instructions nécessaires, chacun prit place à la table qui lui était réservée dans l'attente du top départ. La demi-finale allait donc opposer les 10 meilleurs joueurs au classement cumulé des 8 épreuves individuelles, nommément Tiit Vunk (2176), moi-même alias Bastien Vial-Jaime (1865), Kota Morinishi (1857), Jin Ce (1833), Jan Mrozowski (1831), Jakub Ondroušek (1785), Hideaki Jo (1746), Seungjae Kwak (1728), Sun Cheran (1654) et Jan Novotny (1617). 9 grilles nous attendaient, divisées en 3 séries de 3, chacune comportant une classique et deux variantes. Reprenant le modèle des finales 2011, la totalité des demi-finalistes allait se confronter à la première série mais seuls les sept plus rapides accèderaient à la deuxième, la troisième n'étant ouverte qu'aux cinq premiers arrivés. Pour les traînards, les playoffs s'arrêteraient donc à la 3e ou à la 6e grille.
Playoffs - grille 1 (classic sudoku)
Une grille de difficulté moyenne pour se mettre en train ; Tiit, déjà fort de ses cinq minutes de bonus, en vint à bout rapidement (2'05) et il me fallut encore patienter plus de trois minutes avant de pouvoir l'entamer. Stressé, ma résolution fut plus laborieuse et j'en finis en à peu près 2'45 ; compte tenu du fait que quelques secondes séparaient mon départ de celui de Kota et Jin et que j'en finis avant eux, on peut toutefois supposer que leur temps ne fut pas inférieur au mien sur cette première grille. Je progressai donc d'un rang et rejoignis Tiit qui, après plus de 6 minutes de travail, n'avait pas encore réglé son compte à la deuxième grille.
Playoffs - grille 2 (killer sudoku)
Plutôt un de mes points forts, je savais cependant que plusieurs joueurs parmi mes adversaires étaient loin d'être maladroits sur cette variante, Jin Ce le premier. Je repérai rapidement un premier doublet 79 en région 3, lequel menait au placement de 3 chiffres. Puis je pénétrai une bulle d'inefficacité dont je ne parvins à m'extraire que 8 longues minutes plus tard, après avoir raté absolument tous les placements évidents que comportait la grille - laquelle était de difficulté tout à fait modeste. Tiit n'en avait fini que peu de temps avant moi après plus de 13 minutes de souffrance, et à l'exception de Jan Novotny tous les autres concurrents en avaient profité pour nous rattraper... et nous dépasser.
Premiers arrivés à la table 2, derniers à la quitter
Je résolus sans histoire bien que sans gloire cette troisième grille de difficulté moyenne, dans un temps probablement équivalent à celui de Tiit, mais je savais en rendant ma feuille que les dés avaient été jetés lors de la grille précédente. Sept concurrents avaient déjà entamé la résolution de la deuxième série de grilles, et l'aventure s'arrêtait là pour nous. Nous échangeâmes un regard et la déception qu'il lut dans le mien devait probablement correspondre à celle qui fut la sienne lorsqu'il comprit que c'en était terminé de ses chances après avoir dominé d'une tête l'ensemble de la scène compétitive durant une journée et demie d'épreuves. Devant, la course continuait mais nous ne verrions jamais les six grilles suivantes.
Playoffs - grilles 4 à 9
Corollaire de ma défaite, j'eus tout loisir d'assister en spectateur à la suite de la demi-finale. Mon état de fatigue ne me permit pas d'en retenir le détail mais Kota finit le premier, suivi deux minutes plus tard par Jin avant que Jakub ne vienne compléter le podium et s'emparer de la médaille de bronze.
Finale
Quelques minutes après la fin de la demi-finale, Kota et Jin prenaient place sur l'estrade devant leur pupitre respectif, afin de se mesurer en 3 manches gagnantes sur un maximum de 5 grilles choisies par les finalistes au sein d'une liste comportant classiques et variantes apparues durant le tournoi.
La première grille choisie fut un élégant sudoku classique à 21 chiffres donnés, de difficulté raisonnable. Les deux joueurs avancèrent de façon à peu près simultanée jusqu'au point de blocage mais Jin, en difficulté sur la seconde moitié de la résolution, dut concéder à Kota cette première manche : 1-0.
La deuxième grille consistait également en un sudoku classique ; cette fois les adversaires ne suivirent pas la même piste et Jin prit rapidement l'ascendant alors que Kota persistait à ignorer le coin inférieur droit de la grille. Le temps que celui-ci réoriente ses recherches dans la bonne direction, le joueur chinois en avait terminé : 1-1.
Une première variante nous fut enfin proposée avec la troisième grille, un consecutive sudoku. Kota commit d'emblée une erreur en attribuant arbitrairement un sens croissant à une série de 4 chiffres consécutifs alors que rien ne semblait permettre d'en décider aussi tôt ; et de fait, il réalisa un peu plus tard qu'il s'était fourvoyé. Jin, qui n'était guère plus à l'aise jusque là, finit tout de même par progresser et rendit sa grille le premier : 1-2.
Un ratio sudoku venait ensuite. Variante peu impressionnante en temps normal, celle-ci n'était pourtant pas totalement évidente et les deux joueurs eurent quelques moments de blocage. Kota l'emporta néanmoins avec une marge raisonnable pour revenir à égalité : 2-2.
Tout allait donc se jouer, sans grande surprise, sur un troisième sudoku classique. Mon point de vue ne me permettait pas de suivre le déroulement des choses avec une grande précision mais aucun joueur ne sembla prendre l'avantage de façon décisive dans un premier temps ; tout à coup Jin, étant manifestement venu à bout du passage clé, commença à distancer Kota - la fin de la grille approchait indéniablement quand le japonais amorça une des remontées phénoménales dont il a le secret et, bien que parti de plus loin que son adversaire, il en finit... une poignée de secondes après lui. La juge de Jin valida sa résolution, et c'en fut fini : à travers la Chine, le continent asiatique s'emparait de sa première médaille d'or. Kota Morinishi de son côté héritait d'une troisième médaille d'argent consécutive, le laissant - parmi d'autres - une fois de plus sur sa faim.
Il serait possible d'épiloguer longuement sur le fait qu'en l'espace de trois grilles, les joueurs classés 1 et 2 à l'issue d'un jour et demi d'épreuves, soit après s'être avérés les plus efficaces sur près de 80 grilles, se retrouvèrent relégués aux places 8 et 9. Le fait est que le poids relatif d'une erreur ou d'un moment de blocage sur une grille n'était pas du tout le même sur les épreuves et lors des demi-finales ; la différence était même d'autant plus grande que la politique des organisateurs chinois avait consisté en une assez grande tolérance vis-à-vis des erreurs lors des épreuves, via l'adoption d'un système de points partiels. Si l'on ajoute à cela le fait que la demi-finale était elle-même suivie d'une finale qui remettait à nouveau sur un pied d'égalité ou presque les joueurs classés 1 et 2 lors de l'étape précédente, soit deux remises à (presque) zéro consécutives, on peut s'interroger sur l'efficacité de ce système à désigner le meilleur joueur des championnats. Tout ceci est dit sans acrimonie et je ne remets certes pas en question les résultats de Jin, Kota et Jakub qui ont tous trois offert un excellent niveau de jeu tout au long de la compétition ; je regrette simplement que les playoffs de ces championnats, comme d'autres avant eux, aient une nouvelle fois été établis avec pour but de proposer un contenu spectaculaire - à destination d'une diffusion télévisée dans le cas présent - plus que de tendre vers la plus grande efficacité et le plus grand confort de jeu pour les principaux intéressés. Le principe des "chaises musicales" adopté en 2011 et 2013, certes intéressant du point de vue d'un spectateur, est-il réellement légitime dans le sens où il sanctionne définitivement toute défaillance qui serait rattrapable dans un autre contexte ? Plus radicalement, ne serait-il pas envisageable de simplement désigner le vainqueur à l'issue des épreuves, quitte à proposer une finale "blanche" sans enjeu ? Je n'ai pas de réponse définitive à ces questions mais il me semble qu'elles peuvent faire l'objet d'une discussion possiblement féconde.
Quoi qu'il en soit, telles étaient les règles auxquelles nous avions accepté de nous plier avant la compétition ; après qu'une finale eût été près de me faire progresser de la 4e place à la 1ère, une autre me faisait chuter et quelles que puissent être mes réserves vis-à-vis du mécanisme employé pour les playoffs, le fait demeurait que j'avais faibli là où je n'aurais pas dû. Et bien que cela fût dur, il n'en restait pas moins que les onze épreuves constituant ce tournoi s'étaient avérées des plus plaisantes et que de mes trois participations depuis l'année 2011, ce tournoi resterait comme celui correspondant le mieux à l'idée que je me faisais d'un championnat du monde de sudoku. Mon angine n'avait pas suffi à m'empêcher de profiter des événements et si c'est un peu amer, et complètement aphone, que je passai la soirée du mardi au sein d'une chambre érigée en communauté indépendante et multiculturelle franco-suisso-indienne, le contentement d'avoir vécu à nouveau des moments intenses autant qu'enrichissants était indéniablement le plus fort des sentiments qui m'habitaient alors.
Forte d'avoir placé trois joueurs dans le top 12 et de s'être avérée remarquablement efficace sur les épreuves 7 et 8, la Chine remporta également avec une marge conséquente le tournoi par équipes, suivie de la République Tchèque et du Japon. La France s'en tira à peu près aussi bien que possible compte tenu de l'irruption de la Chine dans le top 3 et notre 4e place par équipes me consola quelque peu de n'avoir atteint aucun de mes objectifs personnels. Nos résultats sur le plan individuel :
Pour la troisième année consécutive nous établissions une nouvelle meilleure performance d'équipe, touchant cette fois du doigt le podium. Considérant que chacun des pays du top 3 avait réussi à placer deux joueurs dans le top 10 individuel, nous n'avions pas à rougir de notre performance d'ensemble.
C'en était maintenant fini de ces 8e championnats du monde de sudoku, mais tout n'était pas terminé... bien loin de là. La compétition reprenait dès le lendemain matin pour les participant(e)s aux championnats de jeux de logique (WPC), dont j'étais une nouvelle fois.
Corollaire de ma défaite, j'eus tout loisir d'assister en spectateur à la suite de la demi-finale. Mon état de fatigue ne me permit pas d'en retenir le détail mais Kota finit le premier, suivi deux minutes plus tard par Jin avant que Jakub ne vienne compléter le podium et s'emparer de la médaille de bronze.
Finale
Quelques minutes après la fin de la demi-finale, Kota et Jin prenaient place sur l'estrade devant leur pupitre respectif, afin de se mesurer en 3 manches gagnantes sur un maximum de 5 grilles choisies par les finalistes au sein d'une liste comportant classiques et variantes apparues durant le tournoi.
La première grille choisie fut un élégant sudoku classique à 21 chiffres donnés, de difficulté raisonnable. Les deux joueurs avancèrent de façon à peu près simultanée jusqu'au point de blocage mais Jin, en difficulté sur la seconde moitié de la résolution, dut concéder à Kota cette première manche : 1-0.
La deuxième grille consistait également en un sudoku classique ; cette fois les adversaires ne suivirent pas la même piste et Jin prit rapidement l'ascendant alors que Kota persistait à ignorer le coin inférieur droit de la grille. Le temps que celui-ci réoriente ses recherches dans la bonne direction, le joueur chinois en avait terminé : 1-1.
Une première variante nous fut enfin proposée avec la troisième grille, un consecutive sudoku. Kota commit d'emblée une erreur en attribuant arbitrairement un sens croissant à une série de 4 chiffres consécutifs alors que rien ne semblait permettre d'en décider aussi tôt ; et de fait, il réalisa un peu plus tard qu'il s'était fourvoyé. Jin, qui n'était guère plus à l'aise jusque là, finit tout de même par progresser et rendit sa grille le premier : 1-2.
Un ratio sudoku venait ensuite. Variante peu impressionnante en temps normal, celle-ci n'était pourtant pas totalement évidente et les deux joueurs eurent quelques moments de blocage. Kota l'emporta néanmoins avec une marge raisonnable pour revenir à égalité : 2-2.
Tout allait donc se jouer, sans grande surprise, sur un troisième sudoku classique. Mon point de vue ne me permettait pas de suivre le déroulement des choses avec une grande précision mais aucun joueur ne sembla prendre l'avantage de façon décisive dans un premier temps ; tout à coup Jin, étant manifestement venu à bout du passage clé, commença à distancer Kota - la fin de la grille approchait indéniablement quand le japonais amorça une des remontées phénoménales dont il a le secret et, bien que parti de plus loin que son adversaire, il en finit... une poignée de secondes après lui. La juge de Jin valida sa résolution, et c'en fut fini : à travers la Chine, le continent asiatique s'emparait de sa première médaille d'or. Kota Morinishi de son côté héritait d'une troisième médaille d'argent consécutive, le laissant - parmi d'autres - une fois de plus sur sa faim.
Il serait possible d'épiloguer longuement sur le fait qu'en l'espace de trois grilles, les joueurs classés 1 et 2 à l'issue d'un jour et demi d'épreuves, soit après s'être avérés les plus efficaces sur près de 80 grilles, se retrouvèrent relégués aux places 8 et 9. Le fait est que le poids relatif d'une erreur ou d'un moment de blocage sur une grille n'était pas du tout le même sur les épreuves et lors des demi-finales ; la différence était même d'autant plus grande que la politique des organisateurs chinois avait consisté en une assez grande tolérance vis-à-vis des erreurs lors des épreuves, via l'adoption d'un système de points partiels. Si l'on ajoute à cela le fait que la demi-finale était elle-même suivie d'une finale qui remettait à nouveau sur un pied d'égalité ou presque les joueurs classés 1 et 2 lors de l'étape précédente, soit deux remises à (presque) zéro consécutives, on peut s'interroger sur l'efficacité de ce système à désigner le meilleur joueur des championnats. Tout ceci est dit sans acrimonie et je ne remets certes pas en question les résultats de Jin, Kota et Jakub qui ont tous trois offert un excellent niveau de jeu tout au long de la compétition ; je regrette simplement que les playoffs de ces championnats, comme d'autres avant eux, aient une nouvelle fois été établis avec pour but de proposer un contenu spectaculaire - à destination d'une diffusion télévisée dans le cas présent - plus que de tendre vers la plus grande efficacité et le plus grand confort de jeu pour les principaux intéressés. Le principe des "chaises musicales" adopté en 2011 et 2013, certes intéressant du point de vue d'un spectateur, est-il réellement légitime dans le sens où il sanctionne définitivement toute défaillance qui serait rattrapable dans un autre contexte ? Plus radicalement, ne serait-il pas envisageable de simplement désigner le vainqueur à l'issue des épreuves, quitte à proposer une finale "blanche" sans enjeu ? Je n'ai pas de réponse définitive à ces questions mais il me semble qu'elles peuvent faire l'objet d'une discussion possiblement féconde.
Quoi qu'il en soit, telles étaient les règles auxquelles nous avions accepté de nous plier avant la compétition ; après qu'une finale eût été près de me faire progresser de la 4e place à la 1ère, une autre me faisait chuter et quelles que puissent être mes réserves vis-à-vis du mécanisme employé pour les playoffs, le fait demeurait que j'avais faibli là où je n'aurais pas dû. Et bien que cela fût dur, il n'en restait pas moins que les onze épreuves constituant ce tournoi s'étaient avérées des plus plaisantes et que de mes trois participations depuis l'année 2011, ce tournoi resterait comme celui correspondant le mieux à l'idée que je me faisais d'un championnat du monde de sudoku. Mon angine n'avait pas suffi à m'empêcher de profiter des événements et si c'est un peu amer, et complètement aphone, que je passai la soirée du mardi au sein d'une chambre érigée en communauté indépendante et multiculturelle franco-suisso-indienne, le contentement d'avoir vécu à nouveau des moments intenses autant qu'enrichissants était indéniablement le plus fort des sentiments qui m'habitaient alors.
Jakub Ondroušek (3) - Jin Ce (1) - Kota Morinishi (2)
Résultats individuels :
1. Jin Ce (Chine)
1. Jin Ce (Chine)
2. Kota Morinishi (Japon)
3. Jakub Ondroušek (République Tchèque)
4. Jan Mrozowski (Pologne)
5. Sun Cheran (Chine)
6. Hideaki Jo (Japon)
7. Seungjae Kwak (Corée du Sud)
8. Tiit Vunk (Estonie)
9. Bastien Vial-Jaime (France)
2. République Tchèque
3. Japon
4. France
5. Slovaquie
6. Allemagne
7. Pologne
8. Inde
9. États-Unis
Forte d'avoir placé trois joueurs dans le top 12 et de s'être avérée remarquablement efficace sur les épreuves 7 et 8, la Chine remporta également avec une marge conséquente le tournoi par équipes, suivie de la République Tchèque et du Japon. La France s'en tira à peu près aussi bien que possible compte tenu de l'irruption de la Chine dans le top 3 et notre 4e place par équipes me consola quelque peu de n'avoir atteint aucun de mes objectifs personnels. Nos résultats sur le plan individuel :
Bastien Vial-Jaime - 9
Sylvain Caudmont - 21
Timothy Doyle - 26
Frédérique Rogeaux - 34
Pour la troisième année consécutive nous établissions une nouvelle meilleure performance d'équipe, touchant cette fois du doigt le podium. Considérant que chacun des pays du top 3 avait réussi à placer deux joueurs dans le top 10 individuel, nous n'avions pas à rougir de notre performance d'ensemble.
C'en était maintenant fini de ces 8e championnats du monde de sudoku, mais tout n'était pas terminé... bien loin de là. La compétition reprenait dès le lendemain matin pour les participant(e)s aux championnats de jeux de logique (WPC), dont j'étais une nouvelle fois.
À suivre !
Nota : certaines images employées pour illustrer l'article ne m'appartiennent pas ; il va de soi que je les retirerai sur simple demande de leur auteur.
Très belle écriture !
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